Casser les consommations d'une salle de spectacle par l’usage : retour d’expérience

30 janvier 2023 :

Nous arrivons à 9h avec Amélie dans le hall de La Nef, salle de Musiques Actuelles à Angoulême.

Pour tout dire, je ne suis pas tout à fait serein. C’est toujours comme ça quand quelqu’un a placé de grands espoirs dans notre travail.


Ce n’est pas que je doute : voilà plus de 5 ans qu’on décortique le fonctionnement de ce genre de lieux, et je sais bien que les gisements sont importants. Mais aujourd’hui, c’est un peu différent. Intérieurement, je me sens comme dans ce film où on demande à un médecin de tenter l’opération de la dernière chance.


Bien que la situation soit devenue assez habituelle fin 2022 (explosion des factures, plan de sobriété, etc.), ici, elle est spécialement délicate, par une conjonction d’ampleur des hausses, de rapidité des conséquences et de faible maîtrise des contrats, qui sont négociés par la Ville.
 

Tout a été assez vite.

Nous avons parlé le 16 décembre avec Laëtitia, la Directrice. Et 4 semaines ouvrable plus tard, nous sommes là.


L’objectif est simple : nous avons 1 journée pour trouver les plus gros gisements immédiatement mobilisables. Évidemment, sans aucun travaux…

Nous y passons donc la journée, guidés par Laëtitia et Pierre, le Régisseur Général, qui connait son bâtiment comme sa poche.

À l’issue de la journée, alors que nous listons une dernière fois les points importants, petit doute, encore. Laëtitia semble perplexe.

Elle lâche : « OK, on va essayer ce que tu dis… mais je ne sais pas encore bien comment je vais expliquer à mon équipe qu’on a fait venir des experts, et que pour qu’on s’en sorte, il va falloir faire des choses aussi basiques ». Petit syndrome de l’imposteur…

28 avril 2023 :

Laëtitia me rappelle, de nouveau le petit doute.

Alors ? Avec ses punchlines habituelles, elle m’explique rapidement que nous allons certainement crouler de travail dans les années à venir. Que nous avons de l’or dans les mains.

Que les résultats sont « surréalistes ». Les relevés montrent, sur ces 3 mois, une chute de 40% des consommations d’électricité et 34% des consommations de gaz.


Sur une facture énergétique globale qui devait friser les 100 k€, évidemment, ça donne de l’air…
 

Je digère, et lui dit, parce que je le pense vraiment : « tu sais… on n’a pas fait grand chose, vous avez fait tout ça presque tout seuls ». Ce qui est vrai : en janvier, nous n’avons touché à rien, ajusté aucun réglage. Ils ont fait tout le boulot.

Bien sûr, ce n’est qu’un début, il y a encore beaucoup à faire, de nombreuses pistes à explorer, l’été à passer…

Mais ce que j’entends dans la voix de Laëtitia, c’est la confiance retrouvée. Cette sensation de pouvoir qui dit « on l’a fait, nous avons du pouvoir, nous sommes compétents, et nous pouvons aller plus loin ». Au delà de l’économie elle-même, nécessaire et urgente, c’est ça qui a une grande valeur pour l’avenir, cette confiance retrouvée.

Alors… qu’ont-ils fait ? Pourquoi est-ce qu’ils ont pu aller aussi vite, aussi loin ? Et est-ce reproductible ailleurs ?

 

Plutôt que de lister les actions précises, nécessairement spécifiques à leur contexte, je pense important d’analyser les freins que nous avons levés pour que la sobriété devienne possible. Il ne fallait effectivement « pas grand chose », parce que ces freins peuvent sembler évidents. Il n’empêche… s’ils étaient si évidents, nous n’aurions pas eu besoin de venir pour que ça se déverrouille.

Voici donc la grille que nous utilisons pour valider que la voie est dégagée quand on souhaite que de la sobriété énergétique se mette en place, illustrée sur ce cas particulier.

(Vous retrouverez sur ce lien l’interview complète de Laetitia et Pierre, pour des approfondissements)

 

LES 5 TÊTES DE L'HYDRE

Nous avons maintenant l’habitude d’appeler ces conditions « Les 5 têtes de l’Hydre ». Parce que comme avec cet animal mythique dont il faut couper toutes les têtes pour gagner le combat, rien ne bougera en matière de sobriété si les 5 freins ne sont pas déverrouillés.

Voici la manière dont nous formulons ces conditions nécessaires :

Pour que de la sobriété énergétique puisse s’organiser en un lieu,
il est nécessaire de :


Pouvoir mesurer des effets et résultats.
Disposer de moyens d’action technique.

D’évoluer dans une organisation adaptée.
Permettre des stratégies alternatives.
Construire et diffuser un récit qui ait du sens.

Formulé de manière aussi concise, cela peut vous sembler un peu obscur. C’est également trop vague pour être réellement opérationnel. Disons que cette formulation est un aide-mémoire, une sorte de check-list.

Voyons à travers le cas de la Nef ce que tout cela signifie.

Thème 1 : Pouvoir mesurer des effets et résultats

Tous ceux qui vendent des systèmes de mesure ou d’analyse des consommations vous le disent : « mesurer, c’est maîtriser ».

Bon, souvent, ils oublient de préciser qu’il s’agit d’une condition nécessaire, et non suffisante. Mais surtout, nous sommes souvent piégés par ce phénomène courant : mesurer ce qu’on peut mesurer, et non ce qu’on doit mesurer.

 

Les enjeux de fond, ici, sont au moins doubles.

 

Le premier point, c’est de faire préciser ce qui a de l’importance. Ainsi, la première question que j’ai posée en arrivant, c’est « alors… quel est l’objectif ? ».

Laëtitia le raconte clairement : ils pensaient juste « on coule, il nous faut une bouée ».

Mais pour agir, trouver la clé et s’assurer de travailler sur les bonnes choses, il nous faut quelque chose d’objectivable.

Nous avons donc commencé la journée en faisant dire à Laëtitia et Pierre ce qu’ils voulaient. C’était peut-être évident (« réduire les factures »), mais jusque là, c’était implicite, et surtout, incomplet.


Parce que l’enjeu n’était pas seulement de diminuer les factures au plus vite. Il était de le faire, pour le dire crûment « avec la paix sociale ». C’est fondamental de se dire cela, aussi, parce que le problème n’est formulé correctement qu’en énonçant ce qui semble une apparente contradiction.


Le deuxième enjeu majeur, c’est de commencer à organiser le feedback. Car quelles que soient les actions que vous mettez en œuvre, la motivation chute si on ne peut pas tisser un lien de cause à effet. Ici, le feedback le plus évident s’est fait sur les relevés de compteurs gaz et électricité. Encore faut-il pouvoir les faire, et les faire… Mais il était aussi sur le moral de l’équipe, les retours, les commentaires.
Évidemment, c’est toujours mieux quand ces indicateurs sont structurés, clairs… Mais avant tout, il faut que leur existence et leur sens soit explicites pour ceux qui organisent la sobriété.

C’est ce que nous appelons, dans la Méthode Design énergétique®, l’organisation de l’information agissante.

Thème 2 : Disposer des moyens d’action technique

C’est absurde de vous demander (par exemple) de baisser une température de chauffage si on ne vous donne aucun organe de réglage des émissions de chaleur.

Cela semble évident, une fois de plus, et ça ne l’est pas. Combien de fois avez-vous vu des éclairages que vous ne pouvez pas éteindre comme vous le voulez ? Des radiateurs verrouillés ? Des boitiers de commande équipés d’un code ? Bien sûr, toujours pour « éviter les dérives », toujours pour la bonne cause.


Le parallèle avec les enfants est évident : soit on les considère incompétents (ou trop petits, ou trop dissipés, etc.), et on leur retire le pouvoir « pour leur bien », soit on reconnait leur possible compétence, et on l’organise et l’encadre pour une évolution en sécurité.


Ici, la présence et la compétence de Pierre, le Régisseur Général, est fondamentale. Il a la maîtrise de quasiment tous les organes du bâtiment, avec un cas particulier sur la CTA, machine centrale d’un tel lieu. Mais il a aussi de bonnes relations avec le technicien de maintenance, qui peut lui aussi agir. Il leur manque, certes, des organes de pilotage fin (pas de GTB, régulation très basique, etc.), mais bon, quand il s’agit d’arrêter le bazar, il y a un bouton, et on peut appuyer dessus.

C’est déjà ça…

Thème 3 : Évoluer dans une organisation adaptée

Je n’étais pas présent lorsque Laëtitia et Pierre ont présenté à leur équipe (une vingtaine de personnes) ce qu’ils allaient essayer de faire.

Ce que je sais, en tous cas, c’est que Pierre a un mandat de sa directrice pour agir tous azimuts. Sur le fond et sur le long terme, il serait opportun que ces aspects « bâtimentaires » soient clairement inscrits sur sa fiche de poste, avec les moyens afférents. C’est rarement le cas dans ce secteur d’activité, et je ne sais pas ce qu’il en est à Angoulême.


Point important : le bâtiment n’appartient pas à ceux qui l’exploitent, qui sont affectataires. Il appartient à la Communauté d'Agglomération. Est-ce que l’équipe de La Nef a « le droit » de jouer avec le bâtiment ? En tous cas, en situation d’urgence, ils ont agi comme s’ils l’avaient, et l’Histoire leur donne raison. Ce frein, souvent évoqué, peut être l’occasion de se rappeler cette phrase souvent citée par Jean-François Caron, maire de Loos-en-Gohelle : « une innovation, c’est une désobéissance qui a réussi ».


De fait, c’est bien souvent cette notion de « avoir le droit » qui bloque en premier, et nous le voyons même chez les particuliers. Couplée à la peur de casser quelque chose, c’est un blocage redoutable. C’est la raison pour laquelle nous cherchons bien souvent de quelle manière nous pouvons organiser un premier essai, un mouvement sans danger.

Encore une fois, un peu comme les enfants qui, devant une interdiction absurde (« ne grimpe pas là-dessus, c’est dangereux »), font une première petite tentative pour voir ce qui se passe.
Et quand ces petites tentatives donnent des résultats prometteurs (entre autre grâce au feedback, voir thème 1), il n’y a aucune raison de revenir en arrière.


Au final, l’une des choses majeures que l’équipe de la Nef a réussi, c’est de s’autoriser l’expérimentation…

Thème 4 : Organiser des stratégies alternatives

C’est une chose de dire « on n'allume pas le chauffage dans le hall ». C’en est une autre de la faire alors que des personnes y travaillent plusieurs heures par jour, et se plaignent du froid. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’immense majorité des Plan de Sobriété, y compris au niveau national, étaient foireux...


Il est tout à fait possible de travailler à un bureau plusieurs heures par jour à une température ambiante de 17, 15, ou même 12 degrés. Nous l’avons fait cet hiver.


Mais cela demande évidemment, de s’organiser différemment qu’à 19 ou 22 degrés. Et pour pouvoir s’organiser différemment, encore faut-il (voir plus haut) pouvoir le faire, c’est à dire avoir les moyens techniques, et avoir le mandat pour les utiliser.


Laëtitia nous a souvent redis qu’elle a utilisé une phrase que j’ai utilisée comme un mantra : « chauffer les gens plutôt que les espaces ». Concrètement : ils ont mis en place de quoi améliorer le confort de l’équipe.
Alors que certaines personnes seulement utilisaient des plaids (surtout des femmes), ils en ont organisé pour tout le monde. Ainsi, son utilisation est devenue normale et (bien sûr), le confort meilleur.

Mais ils ont aussi installé des chauffages électriques sur certains postes. Oui, je sais, c’est le contraire de tout ce qui se dit et pratique. Mais ils l’ont fait de la bonne manière :


- Sur les banques d’accueil qui se trouvent dans les halls : cela permet de couper le chauffage dans le hall, dont les visiteurs n’ont nul besoin, puisqu’ils ne font que passer.

- Avec des appareils rayonnants (et non soufflants) : ils sont directionnels et agissent directement sur le poste de travail sans que la chaleur se perde dans les grands espaces.

- En combinaison avec les plaids et accessoires : le système actif vient en complément des autres outils.

- En en parlant avec les collègues : l’enjeu, l’utilisation sont discutés… et l’autorisation de s’en servir en responsabilité est donnée.

- De manière visible : quand vous allumez l’appareil, tout le monde vous voit. Le public peut vous interroger, vous percevez le regard des autres.


Et que se passe-t-il ? Non seulement, le chauffage est effectivement coupé sans aucun problème dans le hall, mais au final, les appoints rayonnants sont assez peu utilisés. Comme de nombreux objets, en réalité, ils agissent déjà d’une certaine manière en étant présents, en annulant une partie de la peur d’avoir froid.


Cette histoire de « stratégies alternatives », cela revient à organiser un deal gagnant-gagnant. Et comme il y a de multiples stratégies possibles, bien souvent, ce sont les usagers eux-mêmes qui trouvent les bonnes idées, celles qui leur conviennent.

Avec un effet supplémentaire, rapporté par Laetitia : "Nous n'avons pas coupé le chauffage dans le hall, il n a jamais été allumé. Mais nous avons bien travaillé sur le confort de ces postes de travail. Cet accompagnement précis nous a permis de montrer à l'équipe la nuance de votre expertise et donc d'améliorer l'acceptabilité des autres mesures".

Un deal gagnant-gagnant, vous disais-je...

Thème 5 : Construire et diffuser un récit qui ait du sens

Dans la grande majorité des cas, depuis l’automne 2022, la sobriété énergétique nous a été « vendue » avec un discours qui ressemble à peu près à ça :

« bon, les copains, c’est la galère. Nous, on voudrait survivre, donc on vous demande de diminuer un peu tout, partout. Débrouillez-vous pour gérer derrière (mettez donc une doudoune sans manche…), et s’il vous plait, gardez le sourire, c’est pour la bonne cause. PS : si j’en prends un à planquer un radiateur sous son bureau, il va prendre cher, espèces d’égoïstes ».

 

Évidemment on le formule un peu différemment (par exemple ici), mais vous voyez l’idée…
Il n’y a rien de moins enthousiasmant, c’est comme constater qu’on n’a plus qu’un seul pot de la confiture de framboise de Mamie, alors qu’elle est morte l’année dernière.


Ça l’est d’autant moins que cela raconte la même histoire à tout le monde, alors que dans chaque lieu, comme à la Nef, les motivations et contraintes sont fort variées. C’est très différent d’être sur son lieu de travail et sur son lieu de loisir.


L’équipe de la Nef avait une motivation évidente : concrètement, les budgets d’exploitation qui explosent impactent directement les budgets de production. Si on paye plus d’énergie, on peut faire moins de spectacle, et la structure est en grand danger. Ça, c’est simple à comprendre, au moins comme point de départ. Ça ne l’est pas sur le long terme, mais la « récompense rapide » des 40% d’économie des premiers mois, alors que pour la plupart des gens, le confort a été amélioré, permet de continuer un autre récit. Un récit de maîtrise, de compétence…

Et quand, de plus, l’histoire commence à se diffuser (comme avec cet article, mais pas seulement), le récit devient celui d’une équipe de pionniers et d’explorateurs, qui peuvent également aider leurs pairs à mieux s’en sortir.
Vis-a-vis des usagers finaux, l’équipe fait quelque chose de remarquable : elle a organisé un « non-récit ». Cette notion est fondamentale, elle s’appuie sur la manière dont nous organisons la normalité.


Auparavant, il était habituel de pré-chauffer les studios de répétition avant l’arrivée des groupes, de peur qu’ils aient froid. Dès le début de février, ils sont arrêté cette pratique, les groupes arrivaient dans un studio non chauffé. Ils disposaient bien sûr de la commande pour allumer s’ils le souhaitaient. Et l’équipe n’a rien dit. Pas d’annonce en mode « désolé, on fait des économies, alors on n’allume pas… ». Rien.


Et que s’est-il passé ? Dans la plupart des cas, les chauffages n’étaient jamais allumés. Parce que pendant les 20 minutes d’installation, ce n’est pas gênant, et qu’après, les amplis et l’activité physique sont suffisants.


On a donc annulé un sur-service, et le fait de ne pas le raconter (ce qui est une manière particulière de le raconter…) a certainement été plus efficace, parce que moins anxiogène.
L’approche a été la même en ce qui concerne l’eau chaude, qui a été supprimée dans tous les sanitaires sans que cela ne semble gêner personne.

CONCLUSION

Au final, vous aurez peut-être cette impression courante : tout cela est très simple, et relève du simple « bon sens ». C’est une impression fausse.

D’abord parce que si les composants et les raisonnements sont simples, leur mise en place est complexe. Il s’agit de changements d’habitudes sur un lieu de travail, ce qui rend les choses moins « souples ». Et puis malgré tout, nous heurtons beaucoup de croyances : « il faut chauffer sinon les musiciens auront froid », « il faut ventiler sinon ce sera humide », « c’est impossible d’être au bureau par 17 degrés ».


En général, rien de tout cela n’est vrai… mais tant qu’on n’a pas essayé, tout en validant l’ampleur des conséquences, il n’y a fort peu de chances de pouvoir s’en convaincre.

Relisez la circulaire ministérielle : Vous y verrez qu’il s’agit, à travers des choses peu enthousiasmantes et peu efficaces, d’ « aboutir à des feuilles de route de propositions et de recommandation avec pour objectif de réaliser 10% d’économies d’énergie en deux ans ».

Mettez cela en regard de ce qui s’est passé à la Nef, dont le cas n’est pas, loin de là, exceptionnel. En quelques jours, 40%.

Dans un contexte d’urgence, on n’a pas deux ans pour envisager un maigre 10%. Si la politique, c’est de poser des objectifs ambitieux et réalistes (pourquoi pas, SMART), alors cette circulaire ministérielle est une blague, voire un suicide organisé.

Des Nef, il y en a dans quasiment tous les bâtiments que l’on visite, et ces 40% qu’ils ont atteints, ce ne sont que les premiers gisements. Nous avons même des cas, aujourd’hui, où de tels gisements sont atteints sans même qu’on se soit déplacés. Pourquoi ? Parce que pour peu qu’on leur en laisse la possibilité et qu’on ne leur raconte pas n’importe quoi, les usagers sont experts de leurs lieux, et ont la capacité de les reprendre en main.

L’enjeu, ce n’est pas d’en faire des énergéticiens, parce que s’il y a une chose qu’ont montré les experts en énergétique ces 40 dernières années, c’est… qu’ils ne les voient pas et ne vont pas les chercher, ces gisements majeurs.

J’écris cet article en Mai 2023. Il nous reste 4 mois pour préparer l’hiver prochain. Ce qui est possible sur 1 lieu, c’est possible sur 100, sur 1000, et même 10 000, dans tous les domaines.

Alors, on y va, ou on écrit des feuilles de route ?