À quoi sert un Designer énergétique® ?

  • Pratiquer le Design Énergétique
  • 05 Septembre 2017
  • 4 commentaires

 

Voici une dizaine d'années maintenant que j'ose utiliser le terme de "expert" pour caractériser ma pratique professionnelle. Je pense pourtant que cela fait moins de deux ans que je me comporte comme tel avec mes clients. Le "saut" n'est pas simple à effectuer, encore moins à expliquer. Je pense aujourd'hui que la posture de l'expert est fondamentalement différente, parce que son rôle dans un projet est fondamentalement différent. Pour illustrer cela, je vous propose un parallèle avec une de mes aventures... médicales.

 

Il faut pour l'expert un problème sérieux.

Dans les premiers jours de cette année, j’ai pris une résolution : je me remets à l’escalade. Dire qu’il y a quelques années, j’ai beaucoup grimpé relève de l’euphémisme... Entre 1990 et 2005, l’escalade a été mon principal centre d’intérêt, un pivot dans l’organisation de ma vie. J’ai énormément grimpé en falaise, en montagne, en compétition, en bloc, en intérieur comme en extérieur. Je me suis aussi beaucoup abimé. En 1999, en particulier, je me suis salement amoché une épaule, arrachant ligament et nerfs. A la clé : une opération et une rééducation de plus d'un an et demi. Puis, en 2005, j’ai tout arrêté, du jour au lendemain. Je ne sais toujours pas pourquoi. Début janvier 2017, me voici donc inscrit au club d’escalade local pour enfin retoucher à la verticalité. A la troisième séance, alors que je retrouvais tout juste mes sensations, mon bras gauche lancé vers le côté s’est quasiment détaché de mon corps. J’ai retrouvé cette très désagréable sensation de l’épaule qui se disloque. Verdict : les luxations sont de retour.

Le parcours classique

expert - squelette

Suivant le « parcours coordonné des soins », je me rend donc chez mon médecin du sport. Il commence par me prescrire une radio et quelques séances de kiné. La radio ne montre rien. Je vais bien studieusement à mes séances de kiné dont on m’a dit qu’elles pourraient peut-être restabiliser l’épaule. Régulièrement néanmoins, sur des mouvements de plus en plus anecdotiques (tourner un volant, attraper un vêtement, etc.), je sens que « l’épaule sort ». Je retourne donc chez le médecin qui me prescrit un arthroscanner. Pendant le délai d'un mois, je continue un peu la ré-éducation. Je subis enfin l’examen et le médecin spécialisé qui le conduit fait un bilan plutôt flou "...en faveur d'une rupture". So what ? Personne pour me le dire. Je commence à me lasser de la tournure que prennent les évènements, et décide d’appeler directement un chirurgien réputé pour ce genre de problème. Un expert, donc. De nouveau, trois semaines pour avoir un rendez-vous, ce qu nos amène en Avril. Bilan jusqu’à maintenant : 4 mois d’incertitude, une radio, un arthroscanner, des séances de kiné, deux consultations de généraliste plus deux consultation d’un radiologue, ce qui fait 430 €, sans compter les heures cumulées passées à attendre. Le diagnostic n’est toujours pas certain, l'avenir est flou.

Et soudain apparut l’expert

expert - medecin

En ce mardi matin, je me retrouve donc dans la salle d’attente du docteur Michel Duchemin. J’ai bien sûr amené mes documents, mes examens. Après l‘attente, je suis accueilli par trois étudiants, dont deux visiblement étrangers, qui m’introduisent dans un cabinet d’examen. Ils m’expliquent être les assistants du docteur Duchemin, qui va bientôt arriver. Puis ils mènent l’entretien préliminaire en me posant les questions habituelles pour ce genre de pathologie. Après une dizaine de minutes, le chirurgien arrive. Sa poignée de main est franche. « Bonjour, je suis Michel Duchemin, alors qu’est-ce qui se passe ? » L’étudiant qui a conduit l’examen aligne de manière extrêmement condensée et efficace les informations que je lui ai données. Le chirurgien hoche la tête. Puis il saisit mon arthroscanner, le regarde moins de 2 seconde. Il pointe une image  me dit « bien sûr que cette épaule ne tient pas, c'est évident. Vérifions ». Il s’approche alors de moi, m’indique un geste, pousse un tout petit peu sur mon épaule et explique en même temps à ses étudiants. « Vous voyez, le fait qu’il puisse mettre le bras dans cette position indique clairement que le ligament n’existe plus. La kinésithérapie de ne servira à rien. Si on n'opère pas, l'arthrose bloquera l'épaule dans 10 à 15 ans". Se tournant vers moi : " Je vous opère avant l'été." Encore 1 minute d’échanges courtois, pour négocier un report de quelques mois, et le chirurgien quitte la pièce. En tout, tout cela a duré moins de 5 minutes.

Et vous trouvez que l'expert est cher ?

Si je compare les deux situations d’un point de vue strictement comptable, voila ce que ça donne :

  Parcours coordonné Parcours expert
temps cumulé des rdv  15h  2h30
coût total  430€  60 €
durée d'incertitude  4 mois  5 min

 

expert - couloir

D’un coté le parcours coordonnée : 400€, 15h d’attende et de kiné, 4 mois d’incertitude, diagnostic incertain. De l’autre côté : réponse obtenue en 5 min d’intervention d’expert, diagnostic affirmatif, pour 60 € . (L'arthroscanner ayant servi des deux côtés, je l'ai retiré des montants). Il n’y a pas photo. On pourrait considérer que l’expert est cher. Son cout horaire est très nettement supérieur à celui des kiné, médecins généralistes que j’ai pu voir. Certes. A quoi l'on peut rétorquer :

  1. Il a obtenu un résultat, lui.
  2. Cela lui a pris moins de 5 minutes
  3. Il m’a évité de me fourvoyer encore longtemps dans des options qui ne servent à rien.

C’est à cela que sert un expert. Certes, la plupart des experts renommés  ont un cout horaire apparemment exorbitant. C’est parce que le temps n’est absolument pas la bonne unité de mesure pour ce genre de prestation . Ce qui compte c’est de bénéficier pendant quelques minutes d'une expérience accumulée pendant 10, 15 ou 40 ans. C’est cela qui fait la différence. L’expert ne vend pas du temps, il vous permet de racheter, d'économiser notre propre temps, pour l'utiliser au mieux.

 

 

Et le design Énergétique là-dedans ?

Je pense qu'une telle comparaison est pertinente sur les démarches de conception en design énergétique. Prenons brièvement deux exemples : un dans le domaine du bâtiment, l’autre dans le domaine de on en sait pas.

Rôle de l'expert dans le Design Énergétique de Bâtiments

expert - plan

La démarche classique de conception de bâtiment telle qu’elle a été menée depuis des dizaines d’années est la suivante :

  • lorsque l’architecte a un premier plan, il le transmet aux ingénieurs chargés du calcul énergétique.
  • lesquels ingénieurs vont conduire les simulations habituelles, analyser les résultats, sortir un rapport standardisé, exprimer les grandeurs caractéristiques classiques pour le bâtiment et poursuivre l’étude selon le planning prévu.

À l’inverse, un expert en Design Énergétique qui saisit un plan peut, en quelques minutes, identifier les quelques paramètres critiques de la conception. Cela permet de concentrer très tôt les modifications et les efforts de conception sur ces sujets. Le temps gagné est incalculable. C’est le genre d’exercice qui a été réalisé lors de la conception du logiciel OSCAR. Pendant une journée entière, nous avions organisé des speed dating entre un architecte et un ingénieur énergéticien. Chaque rendez vous durait 20 minutes. L’architecte amenait un plan, l’énergéticien ne savait rien du projet. L’enjeu était de savoir ce qu’on pouvait dire sans aucun calcul, sans aucune préparation au bout de 20 minutes. Très concrètement, comment cela se passe-t-il ? L'endroit idéal est un restaurant snack : les nappes en papier permettent la créativité. L’architecte évoque son nouveau projet, donne quelques éléments de contexte (où est-ce ? De quoi s’agit-il ? Quelle performance?) et crayonne sur la nappe les quelques idées qui lui sont venues. Très rapidement, l’énergéticien note des points à vérifier, suggère des modifications, propose « à la grosse » des épaisseurs et positionnements d’isolants, pose quelques questions. En une vingtaine de minutes, les grandes lignes et les grands principes d’organisation émergent, les principaux « loups » sont levés. L’architecte repart avec les informations nécessaires pour bâtir son esquisse, et l’énergéticien peut avoir confiance qu’il ne récupèrera pas d’ici l’APS un bâtiment « mal parti » sur le plan énergétique. Cela ne dure que 20 minutes, sans aucuns calcul. Mais ces 20 minutes puisent dans 10 ans d'expérience. Ca ne vous rappelle pas mon chirurgien ?

 

Rôle de l'expert dans le Design Énergétique industriel

Je vous ai déjà parlé, dans cet article, de ce spectacle qui utilisait une bonne vingtaine de projecteurs pour chauffer un support à peindre. Je ne connais aucun cas d'étude énergétique directement appliquée à un spectacle. A cela, il y a plusieurs raisons : ce n'est pas le sujet (j'y reviendrai bientôt), on a autre chose à penser, il n'y a pas d'argent, etc. Contrairement à l'exemple ci-dessus, il n'y a en général pas de demande du metteur en scène ou du scénographe. Ce qui tombe bien : je parie qu'il se demanderait longtemps à qui s'adresser ! Et bien... même si je suis arrivé trop tard, parce que par hasard, sur ce cas d'étude, je peux vous affirmer que l'élaboration des quelques pistes possibles d'amélioration ne m'ont pas pris plus de 10 minutes. Pourquoi ? D'abord parce que, sur mon sujet d'expertise, je travaille en "tâche de fond". Le problème "mature", et les solutions émergent naturellement. Mais également parce que les contraintes étaient multiples et inhabituelles, ce qui, à la manière de l'OuLiPo, facilite la créativité. Très concrètement, il aurait été possible de mener un travail d'expertise de... disons 15 minutes. Le projet en aurait probablement gagné en légèreté, et efficacité énergétique, en "élégance".  On n'aurait pas tout résolu, mais on aurait grandement amélioré la cohérence globale.

 

Conclusion

expert - pareto

Le design énergétique, à la base et avant toutes choses c’est une application stricte de la loi de Pareto. Cette loi dit que 20% des causes déterminent 80% des effets. Le travail de l’expert c’est, dans le temps le plus court possible, de pointer le doigt sur ce 20% des causes, celles qui vont entrainer 80% des problèmes par la suite, si l’on s’y intéresse pas tout de suite.

La démarche classique, c’est le contraire : passer 80% du temps et ne sortir que 20% de l’information pertinente. On peut voir la distinction autrement. Les protocoles, les démarches balisées (comme les démarches réglementaires), sont justement faites pour s'affranchir autant que possible de l'incertitude humaine.

Un protocole efficace conserve son efficacité quelque soit l'opérateur, pour peu qu'il soit en mesure de le suivre. L'expérience ou l'unicité d'un parcours n'a pas sa place ici. C'est très adapté à certaines situations, telles que les audits systématiques, les productions industrielles, etc. Mais dans tous les cas non standards, la dose d'humanité est plus que nécessaire : c'est elle qui permet d'aller droit au but.

Quel est donc l'enjeu ? D'avoir le discernement de savoir dans quel cas on se trouve.

C'est du standard ? Alors les démarches classiques seront pertinentes.

C'est un cas unique ? Alors cherchez l'expert, surtout au début. Vous n'imaginez pas l'énergie qu'il vous fera gagner, dans tous les sens du terme.